Après quinze ans au service des artistes, Philippe SAUVAN-MAGNET vous invite à partager son expérience à travers ces chroniques et guides gratuits. N'hésitez pas à réagir et à compléter ces informations par votre propre expérience.
Entre 1982 et 1983, le Ministère de
la Culture, sous l’impulsion de Jack Lang a bouleversé les codes qui
régissaient le marché de l’art en créant ex-nihilo une bureaucratie
destinée à diriger toutes la facettes de la création en France, de
l’enseignement jusqu’aux instances de légitimation.
Désormais ce sont des fonctionnaires qui sont chargés de décider ce
qui est bon ou pas, ce qui doit être financé ou pas, ce qui doit
être vu ou pas.
Comme d’habitude, une grande idée était à la base de ces
bouleversements : sauver « l’avant garde » française pour lui
permettre de garder sa place dans l’avènement de l’AC (dénomination
de l’Art Contemporain d’après Christine Sourgins).
L’état voulait à l’époque soutenir avec l’argent public un art non
commercial, et le rendre « accessible à tous », dans une approche
sociale qui aurait pu être salutaire si elle n’avait pas finalement
été dévoyée au point obtenir le résultat exactement inverse de celui
espéré au départ.
En 1991 puis en 2001, les guerres du Golfe se succèdent, entraînant
une première récession, et la disparition de centaines de galeries
d’art, et avec elles la visibilité d’un très grand nombre
d’artistes.
Puis survient en 2007 la grande crise financière. L’argent public se
réoriente sur d’autres priorités, les subventions se tarissent. L’Etat
n’a plus les moyens de ses ambitions.
L’AC devient alors « la chose » d’un cercle restreint de
milliardaires et d’affairistes qui ont compris depuis longtemps
qu’il est plus facile de créer de l’argent avec l’art qu’avec
n’importe quel autre secteur industriel. Ils profitent alors de la
situation pour prendre le pouvoir sur l’économie de l’art et de la
création.
L’idée de Jack Lang d’un art disponible à tous a enfanté un monstre
sans contrôle, dans une dérive financière ou les notion de sens, de
beau ont complètement disparu, jusqu’à devenir des gros mots.
L’art « questionne », « interpelle », mais il ne se collectionne
plus quand on appartient aux classes moyennes.
« L’art pour tous » en 2015, ce sont des sculptures de Koons à
cinquante millions de dollars, fabriquées par une armée
d’assistants, et exposées « pour tous » au grand palais » avec
encore une fois la bénédiction du Ministère de la Culture, financé
par de l’argent public.
Pour le sociologue Alain Quémin »On dirait que tout s’est arrêté
avec les nouveaux réalistes et qu’il ne s’est rien passé depuis 1960
».
Pour Aude de Kerros, dans son ouvrage « 1983-2013, les années noires
de la peinture », toute une profession a disparu, comme par une
extinction naturelle.
Je n’en crois rien. Mon activité chez Active-Art m’amène à sillonner
la France pour réaliser des prises de vues dans les ateliers
d’artistes. Elle me permet d’avoir une vision de terrain de la
situation : les artistes sont là !
Je partage l’avis de Pierre Souchaud, le fondateur de la revue
Artension qui me fait l’honneur de son amitié : la création en
France n’a jamais été aussi foisonnante, ni les artistes aussi
nombreux. Et parmi cette création abondante, un grand nombre
d’artistes de grand talent avec une identité visuelle forte et
originale.
Toute cette création est cachée, car il n’y a plus grand monde pour
la découvrir et la promouvoir. Les « galeries prospectives », celles
qui se destinent à la découverte et à la promotion d’artistes
talentueux sont en trop petit nombre, avec des moyens limités.
Sous les coups de boutoirs de l’AC, la demande a presque disparu,
hormis auprès de quelques amateurs d’art éclairés et fortunés.
Un pan complet de l’économie est entré en hibernation. Et l’hiver
est bien long pour tous ces artistes qui attendent le printemps des
arts depuis deux décennies.
La peinture est morte, vive la peinture !
Depuis une quinzaine d'années, j'expérimente avec Active-Art des nouvelles approches de la communication et de la vente des oeuvres d'art pour tenter de reprendre la main, et de fournir aux artistes qui nous font confiance des outils pour résister au rouleau compresseur de l'AC. Ces chroniques que je me propose de réaliser sur une base hebdomadaire sont un moyen de partager cette expérience avec tous les artistes qui le souhaitent.
J'aspire à un partage des idées et à un retour de votre lecture du problème : n'hésitez pas à me faire passer vos humeurs et vos réactions à l'aide du formulaire présent sur chaque page.
Bonne chance à tous.
Philippe SAUVAN-MAGNET
Cce formulaire vous permet de vous abonner à mes chroniques hebdomadaires, et permet également de me faire part de vos réactions et de poser vos questions. Je ne suis pas sûr de pouvoir répondre à toutes, mais cela sera un bon exercice pour découvrir et analyser des problématiques diverses et enrichissantes que je n'avais peut-être pas prévu d'aborder.
C'est à vous :
*champ obligatoire
conformément à l'article 34 de la loi informatique et libertés du 6 janvier 1978, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant.
A propos de la crise de l'Art Contemporain, je vous conseille la lecture de plusieurs ouvrages
La Bouffonnerie de l'Art Contemporain
par Nicole Esterolle, éditée par Jean-Cyril Godefroy...
En
savoir plus
Les années noires de la peinture
par Aude de kerros, Marie Sallantin et Jean-Philippe Ziegler
Les Mirages de l'art Contemporain
par Christine Sourgins, aux éditions de la Table Ronde
Artistes sans Art ?
de Jean-Philippe Domecq, aux éditions Esprit
Active-Art - 5 rue de Turbigo, 75001 PARIS - Email : contact@active-art.net - Téléphone : 06.14.47.36.00 - Siren : 412 759 755